Amritsar est une halte due à une rencontre qui n’en revenait pas…

AmritsarTempleDorMême après 18 heures de train, la cité au matin est effectivement accueillante. Haut lieu de pèlerinage et de vie de la communauté sikh – religion tolérante, chevaleresque et hospitalière s’il en est-, elle étale les sourires fraternels de ses hommes enturbannés (les attributs des femmes sikh sont moins ostentatoires),

Dans un quartier pour le moins œcuménique malgré les centaines de marchands de keshi, kara, kirpan et autres articles de foi, elle abrite le brillant temple d’or qui renferme le livre sacré des adeptes. C’est et un lieu pieu et de flâneries* : déambulations autour du bassin, pieds nus et tête couverte, au son des hymnes sacrés joués et chantés constamment dans le temple et relayés par haut-parleurs; les disciples y font leurs ablutions pour s’y purifier (occasion de voir leurs longs cheveux), ou prient sous les arcades de marbre gravé des noms de donateurs, les autres se promènent et se prennent en photo.

L’endroit insuffle une ambiance respectueuse et pacifique.

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Il en va tout autrement à 30 kilomètres de là.

À Wagah, les portails de l’unique poste-frontière terrestre indo-pakistannais ferment chaque soir à 18h, en grande pompe, pour le plus grand délire, de part et d’autre, de spectateurs venus par milliers assister à la cérémonie et scander des vivas patriotiques.

WagahBorder1Rien que d’y accéder fait partie de l’expérience: dès 2 heures avant, une foule compacte se bouscule fort comme dans un sablier, et malgré les sifflets des gardes à cheval, pour passer l’unique portique de sécurité dédié à son sexe et la fouille sous une cahute (cigarettes et briquet y resteront), puis se précipite aux gradins (dont une petite section est dédiée aux étrangers). Le spectacle est autant dans les tribunes que sur la piste : rangs serrés de saris, course relais de drapeaux brandis, musique bollywood, danses auxquelles se méler… jusqu’à l’heure de la parade où, en uniforme d’apparat crêté (rouge coté Inde, noir pour le Pakistan), les gardes de chaque bord se livrent, sous les ovations de leur camp, à un protocole imitant la fierté et la colère de jeunes coqs pour finalement ensemble baisser leur drapeau respectif, se serrer la main, et fermer l’accès.**

Cette théâtralité bon enfant autour d’une hostilité très réelle est totalement surréaliste, entraînante, subjuguante et incongrue. La symbolique perceptible des provocations reste discutable et le public, là un peu comme pour suivre un match sportif, semble peu la prendre en compte (comment cela se passe-t-il en périodes de fortes tensions …?)

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Étonnamment, à la baraque de fouille, cigarettes et briquet attendaient leur propriétaire qui a pu les récupérer en repartant…

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*Dans le complexe attenant, chacun peut faire garder ses bagages, il y a une cuisine/cantine communautaire gratuite pour tous, et tous peuvent s’y laver et dormir. Des bénévoles s’occupent de l’intendance.
**Voir un court reportage réalisé par la BBC