Sur la route on tombe aussi, comme à la renverse, sur des congénères, des compagnons de fortune − les ceux qui se promènent parce que. Ce n’est pas parce qu’ils voyagent que nous sommes pareils, mais c’est parce que nous voyageons que nous nous rencontrons: qui nous sommes, si tant est que nous ayons été quelqu’un, a peu d’importance puisque ce jour là nous ne sommes que des étrangers au même point, avec moins de regrets – « nous avons encore l’age d’aimer pour de vrai »*
Qu’ils amusent, qu’ils agacent, qu’ils attendrissent, qu’ils émerveillent voir fascinent, qu’ils montrent la voie ou qu’ils emmènent, ces autres (cette engeance) sont le reflet et l’écho des bonheurs, fuites, exaspérations et interrogations qui accompagnent chaque pas et qui nous captent là, et quelquefois ici, ensemble, devant un café, un paysage, une gare, un choix. Auprès d’eux il fait bon: ne pas avoir à se justifier, ne pas avoir à se contrefaire, juste être maintenant quelquepart sans antécédents ni perspectives, car, par nature, demain nous ne serons qu’un souvenir, une liaison, une perle, plus ou moins précieuse, sur le collier de nos histoires.
Mais une fois qu’on les a approchées, nous ne sommes plus jamais loin de ces parallèles croisées dans l’espace projectif rond qu’est notre monde. Nous ne sommes pas amis, ou pas encore, nous avons pu être amants, nous nous sommes souvent confiés, sans détours ni ambages, les plus secrets de nos voyages vécus, imaginaires et intérieurs, nous n’avons partagé que l’intensité, la séduction féerique, l’émotion et la passion de l’instant vivant… et c’est plus qu’il n’en faut, qu’il n’en a jamais fallu, pour que cela soit un bout à bord, lové comme une aussière.
*« Les Amis D’Autrefois » Anne Sylvestre
C’est vrai que ça a un coté assez confortable les voyageurs croisés, même si, pour certains, au le regrette vite, mais ça fait partie du voyage, les rencontres sont ce qu’elles sont. Pas certains par contre que tous ceux que j’ai pu rencontrer n’aient pas ressenti, pour quelques-uns, le besoin de se contrefaire !
Très beau texte, comme toujours, en tout cas.
Ne nous reste plus qu’à nous rencontrer pour vérifier tout ça ! 😉
Et bien s’il faut que ce soit en voyage, tu n’as plus qu’à aller en Inde en février prochain (enfin, à y retourner plutôt) !
Je crois (j’espère) que je serais désormais en voyage même chez moi a Paris…
Très beau texte, qui transcris bien l’intensité de ces rencontres uniques en leur genre. Car, j’ai beau me creuser la cervelle je ne vois nulle autre lieu que la route, où ce genre de rencontres peuvent avoir lieu. Elles sont intenses parce qu’elle ne durent pas. Fortes parce qu’elles doivent condenser une vie entière en quelques heures… Mais elles sont tristes aussi, car sitôt ouverts à l’autre, nous devons poursuivre notre chemin. J’ai beau en avoir fait plusieurs, des rencontres comme ça, je n’arrive toujours pas à supporter le temps d’après.
Voila qui nous différencie: on a à peine le droit d’être d’être triste d’une belle rencontre, le temps du juste après est certes singulier mais celui de l’encore après est de l’ordre des hasards et/ou des envies (et je crois en l’un et l’autre).
« J’y gagne, dit le renard, à cause de la couleur du blé. » Le Petit Prince – CHAPITRE XXI
Il faut juste prendre le temps d’apprivoiser le renard
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… et accepter d’en devenir responsable pour toujours…