Vassily Kandinsky - Cercles Dans Un Cercle 1923Voyager rime, de fait, un peu, avec risque, incertitude voir danger, mais si l’on se décide c’est bien que la curiosité de l’ailleurs et de l’autre est plus forte que la peur.
Alors est-ce une imprudence irresponsable, une témérité coupable ou une résistance imbécile, quand on est ni reporter ni humanitaire, de choisir pour destination une région qualifiée d’instable, une province perturbée par un conflit politique, militaire, terroriste, mafieux ou religieux.

Il n’est évidemment pas question d’aller gambader sur les champs de mines, il ne s’agit pas de jouer les têtes brûlées sur des routes clandestines, ni d’aller volontairement braver des francs-tireurs, mais juste d’outrepasser les amplifications médiatiques **, de déroger aux principes de précaution péremptoires et, quand c’est encore possible, d’y aller voir par soi-même, sans forfanterie mais non plus d’inquiétude inconsidérées, de faire valoir son droit informé à la réalité du terrain, à la libre rencontre, et ce même sans autre motif plus légitime.

Ce n’est pas jouer les illuminés imperméables aux chaos, ni se précipiter ingénument dans la gueule du loup, que de juger en toute connaissance de cause que le monde est beau, que les hommes sont durs, et vice-versa… et que ce sont de bonnes raisons, que ça vaut la peine de dépasser une adversité présumée pour, au-delà des légendes, manifester de l’ouverture et du dialogue des civilisations même quand elles sont embourbées.

* « Partout où des hommes vivent, un voyageur peut vivre aussi… » Ella Maillart à Nicolas Bouvier (1952) (Témoins d’un monde disparu. (Edition Zoé,2002))
** l’état d’urgence déclaré en région parisienne en 2005 avait semé une paranoïa touristique


« Travel wherever men live »

To travel is a little rhyme with risk, uncertainty and danger, but in leaving we assume the curiosity of elsewhere and also of the others is stronger than fear.
So is this an irresponsible recklessness, a guilty audacity or an imbecile resistance fool, when we are neither humanitarian nor reporter to choose for destination an unstable region, a province affected by a political, military, terrorist, criminal or religious conflict.

There is obviously no question of going frolicking on minefields. It is not a matter of playing the hotheads on smuggling roads, nor of going voluntarily to defy snipers, but just to override the media increases, to derogate from peremptory principles of precaution and,when it’s still possible, to go see for yourself, without boastfulness but neither of concern mindless, to assert its informed right for the reality of the ground, for the free meeting, and this without any other more legitimate motive.

It is not to play the visionaries impervious to chaos, nor to rush unsuspiciously in the mouth of the wolf, that to judge in full knowledge of the facts that the world is beautiful, that the men are hard, and vice versa and that these are good reasons, that it’s worth exceeding a presumed adversity to manifest, beyond legends, openness and dialogue among civilizations even when they are stalled.