SeFaireALaRouteEt puis un jour la route devient vraiment une autre vie qui entraîne, porte, berce, fatigue et émerveille, engueule, culbute ou attache. De nouvelles habitudes prennent corps, de vieilles manies s’estompent, ses propres limites sont quelquefois dépassées, des frontières sont franchies. La liste de ces détails affleure, effleure, s’effeuille:

  • Aimer autant les trajets (à la fenêtre du bus, train, …, avoir quelquefois fugacement envie qu’ils durent toujours) que les étapes.
  • Savoir qu’une seule rencontre peut changer la physionomie d’un lieu.
  • En avoir ras le bol de refaire son sac (en fait ne plus savoir ce qu’il y a au fond).
  • Etre snobement plus surpris par les étonnements des vacanciers fraîchement débarqués que par les choses qui les étonnent.
  • Rêver régulièrement de saucisson.
  • Etre conscient que demain, le paysage sera toujours là, mais pas forcément le soleil ou la pluie ou la saison ou la lumière, qu’y revenir ce sera différent, qu’il faudra y revenir.
  • Avoir expérimenté que le temps, l’espace, et quelquefois l’argent imposent à chaque croisement des choix qui s’ils ne sont pas cornéliens n’en sont pas moins des crève-cœur et que c’est encore l’expression de sa liberté.
  • Choisir de ne pas aller voir des temples, des musées, des ouvrages, …, des incontournables juste parce que ne rien faire depuis la terrasse d’un café c’est tout aussi immanquable.
  • Constater que les meilleurs moments ne font pas l’objet de photos, qu’il est illusoire de tenter de restituer une seconde qui est déjà passée (et donc faire de moins en moins de clichés).
  • Croire étonnamment en soi, en l’homme, en la multitude et l’unicité.
  • … Et, éprouver, comme le disait ce vieil ami, que « où qu’on aille, on s’emmène toujours avec soi ».

Aujourd’hui, « c’est un beau jour pour mourir », mais demain le sera aussi, et la route ne dévoile pas sa fin sur un coucher de soleil.