Le golfe du Tonkin est nimbé d’évocations asiatiques grand format faites de jonques à voiles cramoisies, de sampans silencieux et de villages lacustres reculés. Dans cette mer déjà sublimée, la baie de Ha Long vend un rêve typiquement cinématographique; c’est un de ces lieux dont on se fait des films lumineux qui assemblent à la fois un panorama idéal pris au grand angle, la légende fantasmée d’un phénoménal labyrinthe géologique qui dissimulerait des mystères dans ses brumes, et une envie exagérée d’être époustouflé par la profusion immobile de roches dressées, découpées sur l’horizon, de grottes secrètes et de criques abritées. La baie de Ha Long est une des merveilles naturelles du monde qui prend dangereusement le risque de décevoir à hauteur de son mythe.

A décor fastueux, moyen luxueux : pour parfaire l’expérience l’hydravion s’est imposé comme la plus belle approche permettant d’embrasser l’exubérance du site; il suffirait que la météo soit dégagée …et elle le fut.

Baie de Halong en hydravion

Et vu du ciel limpide, ce jardin d’îlots blottis dans un archipel verdoyant, ce lacis liquide qui serpente entre érosion côtière anthracite, palais de calcaire, mamelons tapissés de végétation saxifrage sombre et atolls aux plages éclatantes est une féerie infinie. En vrai la mer est verte, aigue-marine, opalescente et chaque caillou est une émeraude à l’état brut. L’eau miroite sous les rayons lourds d’un soleil épais, toute sorte d’embarcations glissent à la surface de ce joyau translucide, des fermes piscicoles se nichent au milieu d’anses protégées, le continent est oublié. Quand l’appareil amerrit à l’embarcadère de Tuan Chau la baie a définitivement ensorcelé le spectateur aérien dont l’esprit plane encore au dessus de cette myriade de haut-reliefs.

Vietnam - Baie de Ha Long vue d'hydravionVietnam - Baie de Ha Long vue d'hydravionVietnam - Baie de Ha Long vue d'hydravion

Malgré l’eau dans l’air (il fait 38° avec 90% d’humidité) et que le ciel ait blanchi, prendre dans la foulée le bac qui fait lentement la traversée jusqu’à Cat Ba entérine l’enchantement. Du ras de l’onde, à perte de vue, les perspectives sont hérissées d’une forêt de sculptures fantomatiques, figées dans l’immobilité, leur base sapée par l’érosion marine. Des barques de bambous tressés longent les rives fangeuses, les grillons stridulent et craquettent dans la ramure tropicale. Les falaises émergent et se détachent une à une, jouent à l’aquarelle avec l’ombre, la lumière et la brume, défilent, laquelle luxuriante l’autre dénudée, et dévoilent entre deux parois les minuscules maisons de bois singulières, rudimentaires, des pêcheurs locaux. Il se met à pleuviner, à très fines gouttes drues, tièdes et collantes.

C’est terriblement beau, … sans doute autant que la vie y est rude.

Baie de Ha Long - Bac entre Tuan Chau et Gia Luan (Cat Ba)Vietnam - Baie de Halong Baie de Ha Long - Village flottant