Brésil - Salvador De Bahia / VoyageD’un voyage il subsiste surtout des bribes, des flashs, des instants, des bouts, des détails, des morceaux, des fragments, tout un catalogue d’anecdotes, de petits riens disparates qui se télescopent et se répondent, se font écho et résonnent dans la mémoire, comme des évidences aussi sensibles et nettes que les photographiques qui n’ont pas été prises, un inventaire (é)mouvant, incomplet, sans fin, changeant, évocateur …

A la manière de Georges Perec.

  • Je me souviens de Paul, expat enraciné, architecte, écrivain public, cartomancien, et tenancier édenté d’une guest-house “de passe” à Antsohihy (Madagascar) où les draps rêches étaient marqués “Hospices civils de Lyon 1982”.
  • Je me souviens de l’odeur oh combien entêtante des ylang-ylang.
  • Je me souviens qu’il faut réclamer haut et fort une “récréation” pour qu’un taxi-brousse malgache veuille bien faire un arrêt pipi (et qu’alors chaque sexe fait son affaire de part et d’autre du “bus”)
  • Je me souviens du geste élégant des femmes indiennes qui pour boire à la bouteille sans en toucher le goulot, à la régalade, utilisent leur sari comme un entonnoir.
  • Je me souviens d’avoir dansé, au plus grand étonnement du chauffeur, pour négocier comiquement une course en tuk-tuk.
  • Je me souviens de ce sculpteur de pandals qui ne voulait pas que l’on prenne en photos ses créations parce ses idoles étaient encore nues.
  • Je me souviens n’avoir réalisé qu’une fois à Tokyo que Kim, rencontré au Népal, n’était somme toute pas décalqué mais juste japonnais.
  • Je me souviens que les moines bouddhistes sont prioritaires dans le métro de Bangkok, et que les obèses le sont dans les bus brésiliens.
  • Je me souviens de ne pas avoir obtenu d’explication satisfaisante pour cette mode chez les hommes vietnamiens de porter certains de leurs ongles, si ce n’est tous, extrêmement longs.
  • Je me souviens de l’exceptionnelle lumière du soir sur le mont Fuji, pour une fois dégagé parce que juste après le passage du cyclone Man-Yi qui fit d’importants dégâts à Kyoto.
  • Je me souviens de ce conducteur noir à Los Angeles qui a chaque bagage qu’il rangeait en soute prononçait comme une litanie « You should be proud of yourself ».
  • Je me souviens que les churros des marchés de Potosi (Bolivie) avaient la saveur des bugnes de par chez moi et m’en être gavée.
  • Je me souviens un soir dans une rue de Valparaiso d’un Alien sur échasses dansant au son des percussions.
  • Je me souviens m’être demandé si j’allais pas rester là.
  • Je me souviens qu’au Brésil les familles, pour se dire au-revoir sur le quai de la gare routière, font un signe de croix sur le front du partant.
  • Je me souviens…