Malawi - Fleur de Baobab africainIl y eut d’abord l’illustration tentaculaire du « Petit prince » de Saint-Exupéry (« les baobabs ne sont pas des arbustes, mais des arbres grands comme des églises »); le baobab, cet arbre d’ailleurs qui pouvait envahir et étouffer une autre planète, était alors déjà beaucoup plus impressionnant qu’un quelconque haricot magique de nos contrées.
Son nom exotique avait la sonorité itérative des percussions à peaux tendues, et rimait avec balafon comme syllabe avec typhon.

Puis vint la poésie du Télégramme de Dakar d’Henri Michaux (« arbre-caisson aux rameaux-lourds aux bras éléphantiasiques »), lancinant comme une litanie, appris à l’école française de cette même ville, dans ce pays où les peuples locaux animistes, en guise de sépulture, déposaient leurs griots à l’intérieur des troncs creux de cet arbre cercueil. Au quotidien le baobab de bord de route avait, souvent accompagné de sa termitière, plus de gueule que les allées de platanes de par l’Europe.

Et arrivèrent les voyages, qui donnent à voir et qui, particulièrement dans le cas du baobab, rajoutent des ramifications aux petites idées qu’on s’en fait. Le baobab n’est pas arbre de parcs, 8 espèces (dont une en Australie) aussi dissemblables et tonitruantes que tambour, djembé et bongo ne font pas de la musique de chambre, ça tintamarre haut dans le ciel. Partout où endémique c’est devenu chaque fois une quête de cette colossale architecture végétale, de cette majesté, de ces lieux qui a défaut d’être des cathédrales sont au moins des agoras… Comment aimer l’Afrique sans aimer les baobabs et leurs allitérations flemmardes (Le beau boa baille au bas du baobab) ?

Le baobab c’est des palabres, des légendes, des mémoires plusieurs fois centenaires; pas un de ces vénérables qui n’ait son histoire, publique ou privée, sacrée, païenne, souvent aussi tarabiscotée que ses branches, rocambolesque :

  • Au Malawi, la poudre d’écorce de baobab, fourrée dans la blessure mortelle faite à la proie, neutralise à la cuisson le venin de la flèche empoisonnée qui l’a abattue.
  • Les baobab ne dévoilent pas le nombre de leurs années – même aux scientifiques, mais selon l’âge (incertain donc) de celui de Majunga (Madagascar), la rumeur dit qu’il aurait assisté au XVIIème à la création du royaume sakalava de Boina.
  • Celui là, au Tarangire (Tanzanie), fut longtemps utilisé par les braconniers comme planque pour eux même, leur gibier et leurs armes interdites.
  • A Takoradi (Ghana), parce qu’il n’avait pas ses papiers pour embarquer, un de ces déracinés retarda le cargo qui devait nous emmener à Londres – où 9 de ses congénères avaient déjà été expédié (!?).
  • En Australie, il y eut paraît-il des baobabs prison.

Les baobabs, ce ne sont même pas des arbres, …ce sont des monstres rares, solitaires et gentils.

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